Bally’s, le géant du secteur des casinos, met en garde la ville de Chicago contre une proposition du conseil municipal visant à légaliser les terminaux de jeux vidéo (VGT). Selon l’entreprise, cette initiative pourrait compromettre son projet de casino en entraînant des pertes annuelles de 74 millions de dollars et la suppression potentielle de 1 050 emplois.
L’entreprise a récemment exprimé ses préoccupations par la voix d’Elizabeth Suever, vice-présidente des relations gouvernementales chez Bally’s. Elle a souligné que cette légalisation forcerait la ville et la société à renégocier des « éléments critiques » de leur accord, ce qui inclurait la suspension d’un paiement annuel garanti de 4 millions de dollars. Selon Suever, l’introduction des VGT pourrait entraîner une perte de recettes fiscales annuelles de 260 millions de dollars pour le casino de Chicago, dont environ 70 millions de dollars en impôts qui ne seraient plus perçus par la ville.
Bally’s réaffirme son engagement à créer et maintenir 3 000 emplois au sein de son futur casino permanent, actuellement en construction au sein du complexe River West, évalué à 1,7 milliard de dollars. Cependant, l’entreprise cite l’expérience d’autres villes ayant légalisé les VGT, qui ont vu leurs revenus chuter de 37 %, ce qui pourrait menacer entre 750 et 1 050 emplois à Chicago.
Cette alerte intervient quelques mois après que Bally’s a clôturé une introduction en bourse de 250 millions de dollars liée au casino de Chicago, présentée comme un moyen crucial pour soutenir les pensions de la ville.
En réponse, certains membres du conseil municipal, comme l’échevin Anthony Beale du 9ème arrondissement, expriment leur scepticisme. Beale, qui parraine l’ordonnance sur les VGT, considère les menaces de Bally’s comme exagérées. Il affirme que Chicago abrite déjà plus de 3 000 machines illégales, qui ne génèrent aucun revenu fiscal pour la ville, confrontée à un déficit budgétaire de 1,15 milliard de dollars. Beale estime que la légalisation des VGT pourrait générer entre 60 et 100 millions de dollars par an pour Chicago. « Nous avons ces machines illégales qui ne rapportent rien … Nous ne pouvons pas avoir le beurre et l’argent du beurre », a-t-il déclaré lors de la réunion du conseil du 9 octobre.
D’autres échevins, tels que Brendan Reilly du 42ème arrondissement, critiquent également les projections de Bally’s, qu’ils jugent peu crédibles, notamment après que le casino temporaire de River North n’a pas atteint ses prévisions de revenus.
De son côté, le maire Brandon Johnson s’oppose à l’ordonnance sur les VGT. Il souligne la nécessité pour la ville d’assurer que tout changement maximise les bénéfices pour Chicago sans éroder les recettes fiscales des casinos dédiées aux pensions.
La législation en question, proposée par Beale, permettrait l’installation de jusqu’à six VGT dans plus de 3 500 « lieux publics de divertissement » servant de l’alcool, y compris restaurants, hôtels, théâtres et bowlings. Elle a avancé en comité de licence par un vote de 8 à 6, et Beale compte y ajouter 700 bars et tavernes. Cependant, le vote du conseil municipal du 9 octobre n’a pas eu lieu en raison de l’opposition.
Le cabinet du maire prévient que les VGT pourraient rapporter tout au plus 10 millions de dollars par an, en raison de la cannibalisation potentielle des recettes des casinos, où les machines à sous sont taxées à un taux bien plus élevé que les VGT.
Cette bataille se produit à un moment critique pour Bally’s à Chicago, alors que son complexe permanent doit ouvrir d’ici septembre 2026. Pourtant, des doutes subsistent quant à la capacité de l’entreprise à respecter cette échéance. Le casino temporaire, ouvert au Medinah Temple en 2023, n’a pas répondu aux attentes en matière de génération de recettes fiscales.
Bally’s avait vendu son projet de casino de 1,7 milliard de dollars aux dirigeants de la ville comme un pilier fiscal, promettant des milliers d’emplois et des centaines de millions de dollars en recettes fiscales destinées aux pensions. Le débat sur les VGT menace désormais de rouvrir les termes de l’accord de Bally’s avec la ville, ce qui risque de perturber les investisseurs et d’ajouter une incertitude au projet tant attendu du casino de Chicago.
Pour Chicago, la décision se résume à un pari risqué : étendre les jeux de hasard à l’échelle de la ville pour une injection rapide d’argent, ou protéger l’exclusivité d’un accord déjà en place avec le casino phare.
Luc Lemaire est un blogueur passionné qui adore écrire sur les casinos et l’industrie du jeu. Joueur à temps partiel depuis plusieurs années, il est fasciné par la psychologie du jeu.