Sleeper, une plateforme de sports fantastiques, a intenté un procès fédéral contre la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), accusant l’agence de bloquer illégalement sa voie pour devenir un marchand de commissions à terme (FCM). Ce recours juridique intervient une semaine après que Sleeper ait accusé la CFTC de retarder illégalement son application. Cette affaire pourrait établir un précédent important dans la régulation des contrats d’événements, à mesure que le secteur des marchés de prédiction continue de croître.
Déposé devant le tribunal de district des États-Unis à Washington, D.C., le procès de Sleeper allègue que la CFTC et la présidente par intérim Caroline Pham ont « ignoré de manière flagrante les lois applicables et les protections de base du droit à une procédure régulière » en intervenant dans le processus de candidature de Sleeper auprès de la National Futures Association (NFA). Sleeper affirme que la NFA, un organisme d’autorégulation pour les intermédiaires de dérivés, avait terminé son examen de la candidature de la plateforme en tant que FCM. L’approbation semblait imminente.
Cependant, selon le procès, la CFTC est intervenue et a demandé à la NFA de ne pas approuver la demande. Au lieu de cela, elle a exigé que le dossier soit redirigé vers la CFTC pour examen et approbation. « Cette affaire concerne la CFTC qui ignore de façon flagrante la loi, les règlements et des décennies de pratique pour bloquer, sans procédure ni explication, ce qui aurait dû être une application de routine pour servir de courtier sur les marchés de dérivés, » argue la société dans le dossier fourni par l’avocat de jeux Daniel Wallach.
Sleeper soutient que la NFA a été l’organisme régulateur supervisant l’approbation des applications FCM, tandis que la CFTC supervise le processus d’application pour les DCMs (Designated Contract Markets). Le plaignant affirme également que la CFTC ne peut examiner une candidature tant que la NFA ne l’a pas approuvée. Notamment, Josh Sterling de Milbank représente Sleeper dans cette affaire. Sterling serait aussi pressenti par le Président Trump pour le poste de président de la CFTC. L’actuel candidat, Brian Quintenz, qui siège au conseil de Kalshi, fait l’objet d’un examen minutieux, et le Sénat pourrait ne pas le confirmer.
Le document de plainte énonce également une chronologie des événements débutant fin août, lorsque Sleeper affirme que la NFA avait indiqué que son examen était terminé et que l’approbation était attendue pour début septembre. Cependant, le 5 septembre, l’avocat de la CFTC a informé Sleeper que la candidature était « incomplète. » Les deux parties avaient convenu d’un rappel, que l’agence a brusquement annulé sans explication. Sleeper prétend que l’implication de la CFTC est une pression illégale sur la NFA. Il s’agit également d’une violation de la loi sur la procédure administrative et du cinquième amendement. Sleeper allègue de plus un traitement discriminatoire, notant que des « entreprises similaires » ont obtenu des approbations pour opérer dans le même secteur.
La plainte de Sleeper contre la CFTC survient à un moment où la gestion des marchés de prédiction par l’agence est sous surveillance. Historiquement, la CFTC a été lente à approuver ou à clarifier le statut des contrats d’événements, laissant des entreprises comme Kalshi et Polymarket dans une incertitude réglementaire prolongée. Certains critiques affirment que cette approche lente et détachée crée un terrain de jeu inégal. Certaines entreprises progressent grâce à des partenariats ou des exemptions, tandis que d’autres attendent des années pour obtenir une approbation.
Dans le même temps, les législateurs commencent à remettre en question la position de l’agence, en particulier sur les contrats d’événements sportifs très débattus. Un projet de lettre circule au Capitole, dirigé par les sénateurs Catherine Cortez Masto (D-NV) et John Curtis (R-UT), demandant pourquoi la CFTC a permis à ces contrats de proliférer de manière à brouiller la ligne entre les dérivés financiers et le jeu. La lettre s’interroge également sur les efforts de l’agence pour protéger les consommateurs.
Les sénateurs ont averti que la position de la CFTC permettant à ces contrats de croître risque de saper la souveraineté des États et des tribus dans la régulation des paris sportifs. Les législateurs ont exigé des réponses de l’agence d’ici fin octobre. Cette tension entre la prudence réglementaire, l’innovation industrielle et la pression politique forme le contexte de l’affaire Sleeper et aide à comprendre pourquoi son issue pourrait résonner bien au-delà de la demande d’une seule entreprise.
Les affirmations de Sleeper selon lesquelles des « entreprises similaires » ont obtenu des approbations ne sont pas sans fondement, car certains rivaux progressent. PrizePicks a récemment obtenu l’autorisation de la NFA pour agir en tant que marchand de commissions à terme, après sa prise de contrôle par Allwyn Entertainment. Par ailleurs, Underdog s’est associé à Derivatives North America de Crypto.com (CDNA) pour lancer des marchés de prédiction sportive dans 16 États. Cette collaboration permet aux utilisateurs d’échanger des contrats sur des événements sportifs majeurs via l’infrastructure de la CDNA, qui est directement intégrée à l’application Underdog.
Ce partenariat a permis à Underdog de proposer des paris combinés dans des États où les paris sportifs ne sont pas encore légaux, y compris en Californie et au Texas. L’entrée des concurrents dans l’espace met en évidence les revendications de Sleeper : alors que ses rivaux DFS avancent avec des produits et des partenariats réglementés, Sleeper reste impliqué dans un différend réglementaire qui pourrait le forcer à jouer le rattrapage, même s’il entre enfin sur le marché.

Luc Lemaire est un blogueur passionné qui adore écrire sur les casinos et l’industrie du jeu. Joueur à temps partiel depuis plusieurs années, il est fasciné par la psychologie du jeu.